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L’Académie nationale de médecine a récemment rédigé son premier rapport présentant l’état actuel des connaissances sur le burnout et les recommandations pour sa prévention et sa prise en charge. Cette prise de position intervient au moment même où était déposée une proposition de loi pour faire reconnaître le burnout comme maladie professionnelle.

Épuisement émotionnel, dépersonnalisation, réduction de l’accomplissement personnel… le burn-out est susceptible de toucher pratiquement toutes les populations de salariés. Fruit des réflexions d’un groupe de travail pluridisciplinaire créé en 2014 sur le sujet, le rapport de l’Académie nationale de médecine pointe du doigt de nombreuses lacunes dans la connaissance de ce phénomène.

« En l’état actuel, le burnout n’est pas un diagnostic médical. Ce qui ne remet pas en cause son existence, ni la souffrance qu’il engendre », souligne l’un des rapporteurs du dossier, Jean-Pierre Olié, psychiatre et membre de l’Académie. Cette situation pourrait évoluer, notamment avec davantage de recherche médicale sur le sujet. Le rapport note qu’« à ce jour aucune pathologie mentale ne figure dans le tableau des maladies professionnelles (…) probablement du fait de l’imprécision des contours de cette réalité », mais souligne que les dépressions peuvent actuellement être reconnues comme maladies professionnelles « hors tableau », par recours devant les Comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (C2RMP).

De nombreux acteurs impliqués

La prévention du burnout s’inscrit dans des stratégies plus générales de prévention des risques psychosociaux (RPS) : organisation du travail, management des personnes, etc. « Ainsi, la lutte contre le “workaholisme” et le surinvestissement de l’activité professionnelle doit faire partie intégrante de la démarche de prévention, estiment les auteurs. La prévention du burn-out professionnel doit être conçue par le management de l’entreprise au plus haut niveau. » Or, plusieurs rapports ont souligné que les managers français sont insuffisamment formés à la santé au travail. Selon l’Agence européenne de sécurité et santé au travail (Osha), la France accuse du retard par rapport à certains de ses voisins dans la lutte menée par les entreprises contre le stress au travail et la prévention des RPS.

Autres acteurs clés de la prise en charge : les services de santé au travail. « Dans les entreprises, les services de santé et les médecins du travail ne sont qu’exceptionnellement sollicités pour la mise en place de stratégies de promotion de la santé mentale », regrettent les auteurs. « Les médecins du travail, de moins en moins nombreux, passent l’essentiel de leur temps à des actes de routine, déplore Alain Acker, médecin du travail et membre du groupe de travail. Ils devraient en être déchargés pour mieux coopérer à la définition des actions de prévention de la santé au sein de l’entreprise. »

Le rôle du médecin du travail est de conseiller l’employeur, les représentants du personnel et les salariés sur les questions de santé au travail, rappelle le rapport qui préconise la collaboration entre service de santé au travail et management de l’entreprise dans la démarche de prévention du burnout et des pathologies mentales liées au travail. Par ailleurs, l’Académie recommande de donner la priorité aux maladies dites de société (complications somatiques et psychiques du stress), dans les programmes de formation des étudiants en médecine et de développement professionnel continu des professionnels de santé.

Au-delà du monde du travail, et de l’implication des acteurs de prévention de l’entreprise, l’information fait partie des recommandations du rapport. « Le ministère de la Santé paraît avoir délaissé cette question de santé publique », déclare le rapport. Jusqu’à présent, c’est le ministère du Travail, par l’intermédiaire de la Direction générale du travail, qui a pris en charge la problématique du burnout, en collaboration avec l’INRS et l’Anact (1). L’Académie souligne la nécessité de créer une structure capable de faciliter la coopération entre les ministères concernés (Santé, Travail et Recherche), à l’instar de ce qui existe pour d’autres questions de santé et sécurité publique telles que toxicomanies ou sécurité routière. « Il est urgent que le ministère de la Santé développe des campagnes d’information auprès du grand public et des professionnels de soins pour une promotion de la santé mentale », conclut le rapport.