Le fonctionnement des supply chain est, la plupart du temps, bien maîtrisé. Ici, c’est la procédure de rappel des produits qui semble avoir été mal appliquée.
Présence d’ochratoxine A supérieure au seuil réglementaire dans du blé précuit, soupçon de particules métalliques dans des pots de pâte à tartiner au spéculoos, lait de suite avec une mauvaise date limite de consommation ou teneur trop élevée en acrylamide dans des biscuits pour bébés… La liste des rappels de produits de l’année 2017 est longue, mais aucun n’aura déclenché le scandale qui vient de toucher Lactalis.
« Rappeler un produit est une action qui est assez bien maîtrisée par les fabricants comme par la grande distribution », juge Zaïella Aïssaoui, directeur des risques et assurances de Bouygues Construction. Dans le cas de Lactalis, estime celle qui est aussi présidente de la commission responsabilités de l’Association pour le management des risques et des assurances de l’entreprise, ce n’est pas tant le risque en lui-même qui a été perturbateur et complexe, « c‘est un problème d’enchaînements dans la communication et dans la cellule de crise, qui n’a pas eu les effets escomptés à temps ». Le constat de Laurent Giordani, associé fondateur du cabinet spécialisé Kyu et coauteur de « La Gestion du risque supply chain dans l’entreprise » (Amrae) corrobore ce point de vue. « Des crises de supply chain, il y en a tous les jours dans les grands groupes ! », souligne-t-il. « S‘il y a bien un sujet maîtrisé par les gros acteurs de l’agroalimentaire et de la distribution, ce sont les problématiques de traçabilité de denrées alimentaires », ajoute-t-il. Le cas du groupe laitier démontre surtout combien « une chaîne d’approvisionnement est complexe et donne toute sa mesure à la notion d’entreprise étendue » (voir ci-dessus). Période de contamination sous-estimée ? Lots incriminés mal appréciés ? Instructions de retrait incomplètes et insuffisamment validées en retour ? Le rappel des produits a en tout cas mal fonctionné.
Scénario catastrophe
Pour les experts, le péché originel relève de la sous-estimation de la criticité de la crise, autrement dit d’un indice mariant probabilité de l’accident, gravité de ses conséquences et facteur émotionnel. « Il est évident qu’une entreprise de la taille de Lactalis a établi une cartographie des risques et que le risque de produits défectueux y figure. Le risque produit défaillant est en effet un risque de base commun à toute entreprise industrielle, commente Sophie Mauvieux, administratrice de l’Amrae et directrice des risques de Gemalto. Le problème ne vient pas de l’identification théorique du risque et de l’existence ou non d’outils pour le gérer, mais de la capacité à appréhender une crise qui nécessite une intervention urgente. »
Sophie Mauvieux invite les entreprises, qui auront au préalable établi un scénario catastrophe et identifié les impacts potentiels sur l’ensemble de leurs parties prenantes, « à mettre en place des relais de communication efficaces avec chacune d’entre elles, tels que des centres d’appels, pour éviter de faire face à une panique informative ». Au-delà de la question d’une vertu initiale, « la différence concurrentielle se joue aussi sur la capacité à anticiper ce genre de crise pour ne pas improviser », analyse Laurent Giordani. D’ailleurs, l’effet d’expérience étant primordial, « les entreprises les plus matures en supply chain ont mis en place des dispositifs permanents de gestion de crise et de continuité d’activité ».
Source: https://business.lesechos.fr/
Vous souhaitez élaborer un plan de gestion de crise, Riskattitude vous accompagne dans votre démarche. Contactez-nous