Depuis la publication du décret pénibilité, les demandes d’intervention des ergonomes se multiplient. L’occasion pour les entreprises de dresser un diagnostic sur les postes de travail mais aussi d’en profiter pour améliorer la santé et le bien-être de leurs salariés. Une démarche qui peut s’avérer rentable. Avec l’allongement des durées de cotisation et du départ à la retraite, la majorité des salariés vont avoir de plus en plus de difficultés physiques à rester en poste. A moins que leurs employeurs ne fassent appel à un ergonome.
30% des professionnels disposant du titre d’ergonome européen sont français
Tous les ergonomes ne sont pas diplômés d’un Master d’ergonomie. La plupart ont une formation de psychologue, médecin ou ingénieur, notamment. « Ils proviennent soit du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) où ils ont suivi un cursus complet en ergonomie, soit d’une université, voire d’une école où ils ont suivi un cursus en psychologie du travail ou en ergonomie dans le cadre d’un Master 2. On trouve aussi des doubles cursus », indique Gérard Valléry, professeur de psychologie du travail et d’ergonomie à l’université de Picardie Jules Verne à Amiens (Somme). A la différence des médecins et des avocats, la profession d’ergonome n’est pas réglementée. Il existe pourtant un titre européen reconnu par la profession qui est décerné en fonction de critères précis « Sur les 650 ergonomes pouvant s’en prévaloir en Europe, la France en compte 150 environ », rapporte Gérard Valléry.
Sur les 10 critères de pénibilité, trois nécessitent un diagnostic sur des aspects ergonomiques
Plus développée en France que dans la plupart des autres pays européens, la profession d’ergonome reste encore mal connue de la plupart des dirigeants d’entreprise. Ces derniers ont pourtant une forte responsabilité vis à vis de la santé physique et mentale de leurs salariés (voir l’article L4121-1 du code du travail). Mais plusieurs facteurs vont favoriser le recours aux ergonomes. A commencer par le coût indirect de l’absentéisme estimé à 45 milliards d’euros en 2015 pour le secteur privé. A cela s’ajoute la réglementation en matière de pénibilité. La loi sur les retraites oblige en effet les entreprises à poser un diagnostic. Sur les 10 facteurs de pénibilité énoncés par le décret du 9 octobre 2014, trois concernent les contraintes physiques marquées*. A savoir, les manutentions manuelles de charges, les postures pénibles, et les vibrations mécaniques.
Les risques psycho-sociaux aussi pris en compte par les ergonomes
Sur le terrain, l’ergonome observe et analyse, en fin limier, les situations de travail afin d’identifier les éléments structurels de l’activité et en détecter les effets probables sur la santé des salariés. Il saura par exemple évaluer les contraintes d’une charge lourde ou d’une posture sur le corps et les comparer aux normes à vigueur. « Mais notre valeur ajoutée consiste avant tout à mettre en avant les processus de régulation que les salariés appliquent dans le travail réel pour réaliser la tâche qui leur est demandée (travail prescrit) et à mesurer les répercussions de ces processus sur la santé », souligne l’ergonome. L’analyse de l’activité sert à établir un diagnostic, véritable état des lieux des facteurs de risques pour une situation donnée. L’ergonome accompagne ensuite la recherche de solutions pour construire un plan d’actions concrètes et adaptées. Cette démarche est menée de manière participative, avec les salariés concernés, les Instances représentatives du personnel (IIRP), les préventeurs, le médecin du travail, les services supports (RH, achats, services techniques), et bien sûr la direction. L’ergonomie ne se limite d’ailleurs pas aux seuls effets du travail sur le corps humain. Cette discipline s’intéresse aussi à la charge mentale qui pèse sur l’individu au travail, de manière à prévenir ou réduire les RPS (Risques psychosociaux). « En général, nous n’intervenons pas seuls mais en collaboration avec des psychologues du travail qui permettent d’analyser le ressenti des salariés », reprend Cédric Leborgne. A l’instar de ce dernier, les 3.000 ergonomes français interviennent, en majorité, en tant que consultants. Tandis que les autres opèrent au sein de services de santé au travail, d’organismes de prévention et de centres de gestion. Voire même dans de grandes administrations ou entreprises comme Airbus, PSA, ou Renault.
Les ergonomes ont du pain sur la planche
Cette situation n’est pas surprenante. Un rapport sur le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) remis en 2015 au Premier ministre, déplore que les entreprises et, en particulier, les TPE et PME, n’ont que très rarement procédé à un diagnostic formalisé des facteurs de risques de pénibilité. De plus, seuls 20% des salariés des entreprises de moins de 20 salariés étaient couverts en 2010 par un Document unique d’évaluation des risques professionnels (Duerp), pourtant obligatoire depuis 2001. Il y a donc du pain sur la planche pour les ergonomes. D’autant que des aides existent. A commencer par le dispositif TMS Pro Diagnostic qui finance à hauteur de 70% les prestations ergonomiques plafonnées à 25.000 euros. Cette aide s’adresse exclusivement aux entreprises de 1 à 49 salariés. A cela s’ajoute la possibilité d’accéder au programme TMS Pro Action** qui permet, une fois le diagnostic et le plan d’actions réalisés, de bénéficier d’une aide pour l’acquisition d’équipements adaptés afin de réduire les TMS. Ces pathologies touchent toutes les entreprises et tous les secteurs d’activité, de l’industrie aux BTP en passant par l’activité des services (banques, assurances et administrations). Sur les 1.767 TMS déclarés en 2014 dans ce secteur, 50% concernait la main (main, poignet et doigts), 28% l’épaule et 20% le coude. Parmi les causes probables, la hauteur insuffisante du siège par rapport au plan de travail, la mauvaise position de l’écran, du clavier ou de la souris.
Ergonomie, performance globale et RSE
L’ergonomie ne se limite donc pas aux environnements de production. Elle intéresse d’ailleurs toutes les entreprises qui cherchent à développer une démarche de performance globale. Laquelle ne porte plus seulement sur les résultats financiers de l’entreprise et sa capacité à maîtriser la qualité des produits. Elle englobe aussi la capacité de l’entreprise à veiller à la santé et au bien-être de ses employés. Ce qui, à ce titre, inclut leur bon développement physique et mental. Sur ce dernier point, la performance globale fait cause commune avec la démarche RSE (responsabilité sociétale de l’entreprise) à laquelle de plus en plus d’entreprises souscrivent.
Source : Infoprotection
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